Du maïs grain à nouveau très sec

La récolte 2023 est une belle surprise. « Nous avons pourtant eu peur, confie Raphaël Comte, directeur collecte et commercialisation chez Oxyane. Les semis ne se sont pas très bien passés, ils ont été réalisés en deux fois et se sont donc étalés dans le temps. Mais l’été, et particulièrement le mois de septembre, a été extrêmement propice à la culture du maïs, ce qui a permis de rattraper le retard et d’assurer une très bonne qualité sanitaire. » Selon Agreste, la production nationale de maïs grain est estimée à 12,1 Mt, en hausse de 10,7 % par rapport à la très faible récolte 2022, mais en baisse de 9,1 % par rapport à la moyenne quinquennale. Une évaluation « sous-estimée » d’après Arvalis qui table plutôt sur un volume minimal de 13,1 Mt, auquel pourraient venir s’ajouter 500 000 t de maïs initialement fourragers.

Rendements : retour à la normale

Le rendement national s'élève de plus de 20 % à 95,7 q/ha (+ 21,8 %) selon Agreste (voire 101 q/ha selon Arvalis) et à 114,6 q/ha pour le maïs irrigué contre 87,2 q/ha pour le pluvial. Du côté d’Oxyane, les rendements sont revenus à la normale avec 95 q/ha contre 81 q/ha en 2022. Dans le Sud-Ouest, Lur Berri se réjouit de les voir augmenter de 35 %, avec en moyenne 100 q/ha. Quant au négoce Cholat, il voit ses rendements varier de 19 q/ha à 150 q/ha. « Le maïs irrigué a été une bonne surprise avec un rendement moyen de 110-120 q/ha, se félicite François Maxence Cholat, responsable filière du négoce éponyme. Toutefois, certaines parcelles ont été touchées par la chrysomèle, expliquant des rendements inférieurs à 35 q/ha. »

En tout cas, cette année, les maïs sont rentrés particulièrement secs. Oxyane affiche un taux d’humidité moyen de 17,5 %. « Historiquement, nous n’avons jamais connu ça », témoigne Raphaël Comte. Même constat au silo InVivo d’Ottmarsheim (Haut-Rhin) où Nicolas Barjot, directeur d’exploitation, table sur une moyenne à 20 %. « C’est l’année la plus sèche que l’on ait jamais enregistrée », constate-t-il également. Dans le Sud-Ouest, les maïs sont rentrés à 23 % chez Lur Berri et à 22 % chez Maïsadour. En effet, la collecte 2023 a été marquée par une fin de cycle « idyllique, reprend Raphaël Comte. Avec les températures que nous avons eues aux mois de septembre et d’octobre, il fallait deux jours pour perdre un point d’humidité en maïs, c’est du jamais vu à cette période-là. » Une bonne nouvelle pour les agriculteurs donc, une moins bonne pour les sécheurs. « Cela représente beaucoup de chiffres d’affaires en moins », s’inquiète Nicolas Barjot.

Forte concurrence ukrainienne

Côté cours, depuis l’automne 2022, « nous assistons à une inversion de tendance avec une baisse significative des prix », signale Franck Laborde, président de l’AGPM. En effet, ils n’ont cessé de diminuer pour atteindre les 200 €/t sur l’échéance novembre d’Euronext. Une pression baissière qui est maintenue par une production mondiale au rendez-vous et par l’arrivée de la récolte du pourtour de la mer Noire. Face à un maïs ukrainien à « 100 €/t », dixit Frank Laborde, le maïs français n’est pas concurrentiel. « Cette année, la dynamique de marché s’est inversée, les agriculteurs ont eu du mal à s’engager très tôt, explique Frédéric Ducournau, animateur collecte chez Maïsadour. Si, en septembre 2022, nous étions à 80 % d’engagements, cette année nous n’en étions qu’à 35 %. » De plus, les acheteurs ne se jettent pas sur le maïs français. « Nous arrivons à faire de petits volumes par-ci par-là, mais depuis un mois il y a très peu d’acheteurs pour des volumes conséquents », s’inquiète François Maxence Cholat. Un calme également observé chez Lur Berri qui déplore « les prix dégradés » proposés en dégagement. Toutefois, selon Franck Laborde, les agriculteurs devraient voir quand même leurs marges se restaurer.